Danton, A Study

Appendix IX.

EXTRACTS FROM THE MEMOIR WRITTEN IN 1846 BY THE SONS OF DANTON.

 

This memoir was written by Danton’s sons. Both survived him, the one by fifty-five, the other by sixty-four years (1849, 1858). Their fortune was restored to them by the Republic two years after their father’s death (13th April 1796). Their guardian, Charpentier (their maternal grand-father), died in 1804; they then were taken in by Danton’s mother, Mme. Recordain, who was still living at Arcis. She died in October 1813, a year in which the youngest came of age, and they sold out the greater part of the land in which Danton’s fortune had been invested, and appear to have put the capital into one of the new factories which sprang up after the peace. In 1832 we find them partners and heads of a cotton-spinning establishment at Arcis, which they maintain till their deaths. They left, unfortunately, no surviving sons.

 

The manuscript was written for Danton’s nephew, the son of a younger brother. This nephew became inspector of the University of Paris, and lent the MSS. to several historians, among others, Michelet and Bougeart It finally passed into the possession of the latter, who gave it to Dr. Robinet. This writer printed it in the appendix of the “Vie Prive,” from which I take it.

 

It is not a precise historical document, such as are the official reports, receipts, &c., upon which much of this book depends. Thus, it ignores the dowry of Mdlle. Charpentier and the exact date of the second marriage; it is weak on some points, especially dates, but there attaches to it the interest due to the very quality from which these errors proceed I mean its familiar reminiscences. While the memory of these men, advanced in life, is at fault in details, it is more likely to be accurate in the motives and tendencies it describes than are we of a hundred years later.

 

"Rien an monde ne nous est plus cher que la me'moire de notre pere. Elle a t, elle est encore tons les jours calomnie'e, outrage'e d'une maniere affreuse; aussi notre de*sir le plus ardent a-t-il tou- jours e'te' de voir 1'histoire Ini rendre justice.

 

" Georges- Jacques Danton, notre pere, se maria deux fois. II epousa d'abord en juin 1787, Antoinette-Gabrielle Charpentier, qui mourat le 10 f^vrier 1793. Dans le cours de cette mme anne*e 1793, nous ne pourrions pas indiquer l'e"poque precise, il Epousa, en secondes noces, Mademoiselle Sophie Gely, qui vivait encore il y a deux ans (nous ne savons pas si elle est morte depuis). Notre pere en mourant ne laissa que deux fils issus de son premier manage. Nous somnes ne"s Tun le 18 juin 1790, et 1'autre le 2 fe"vrier 1792; notre pere mourut le 5 avril 1794; nous n'avona done pas pu avoir le bonheur de recevoir ses enseignements, sea confidences, d'etre untie* s a ses pense"es a ses projets Au moment de sa mort tout chez lui a t saisi, confisque", et plus tard, aucun de ses papiers, a 1'exception de ses titres de propriety ne nous a e*te* rendu. Nous avons e^e* Sieve’s par M. Francois-Jerdme Charpentier, notre grand-pere maternel et notre tuteur. II ne parlait jamais sans attendrissement de Danton, son gendre. M. Charpen- tier, qui habitait Paris, y mourut en 1804, a une e*poque ou, sans doubt, il nous trouvait encore trop jeunes pour que nous puissions bien appre"cier ce qu'il aurait pu nous raconter de la vie politique de notre pere, car il s'abstint de nous en parler. Du reste, il avait environ quatre-vingts ans quand il mourut; et, dans ses dernierea anne"es, son esprit paraissait beaucoup plus occup^ de son avenir dans un autre monde que de ce qui s'&ait passe* dans celui-ci. Apres la mort de notre grand-pere Charpentier, M. Victor Charpentier, son fils, fut nomine" notre tuteur. II mourut en 1810. Quoiqu'il habitat Paris, nous revtnmes en 1805 &. Arcis, pour ne plus le quitter. La fin de notre enfance et le commencement de notre jeunesse s'y coul&rent aupres de la mere de notre pere. Elle etait affaiblie par 1'^ge, les infirmite’s et les chagrins. C'etait toujours les yeux remplis de lannes qu'elle nous entretenait de son fils, des innombrables temoignages d'affection qu'il lui avait donnas, des tendres caresses dont il 1'accablait. Elle fit de frequents voyages , Paris j il aimait tant a la voir a ses c6t^s ! II avait en elle une confiance entiere; elle en 6tait digne, et, s'il eut eu des secrets, elle les eut connus, et nous les eussions connus par elle. Ties souvent elle nous parlait de la Revolution; mais, en embrasser tout 1'ensemble d'un seul coup d'ceil, en appre"cier les causes, en suivre la marche, en juger les homines et les ev&iements, en dis- tinguer tous les partis, deviner leur but, demeler les fils qui les faisaient agir, tout cela u'e"tait pas chose facile, on conviendra: aussi, quoique la mere de Danton eut beaucoup d'intelligence et d'esprit, on ne sera pas surpris que, d'apres ses r^cits, nous n'ayons jamais connu la Evolution que d'une maniere extrSmement con- fuse. .

 

" Sa mere, d'accord avec tous ceux qui nous ont si souvent parle 1 de lui pour 1'avoir connu, et que notre position sociale ne fera, certes, pas suspecter de flatterie, sa mere nous Ta toujours d^peint comme le plus honnSte homme que Ton puisse rencontrer, comme rhomme le plus aimant, le plus franc, le plus loyal, le plus d6sin- tress, le plus g^n^reux, le plus de*vou k ses parents, a ses amis, k son pays natal et a sa patrie. Quoi d'^tonnant, nous dira-t-on? Dans la bouche d'une mere, que prouve un pareil eloge? Rien, sinon qu'elle adorait son fils. On aj outers: Est-ce que pour juger un Uomme la poste'rite' devra s'en rapporter aux declarations de la mere et des fils de cet homme 1 IS T on, sans doute, elle ne le devra pas, nous ne convenons. Mais aussi, pour juger ce mme homme devra-t-elle s'en rapporter aux declarations de ses ennemis? Elle ne le devra pas davantage. Et pourtant que ferait-elle si, pour juger Danton, elle ne consultait que les * M^moires ' de ceux qu'il a toujours combattus? , . .

 

*' On a reproche k Danton d'avoir exploit^ la Revolution pour amasser scandaleusement une fortune enorme. Nous aliens prouver d'une maniere incontestable que c'est k tres grand tort qu'on lui a adress^ ce reproche. Pour atteindre ce but, nous allons comparer r^tat de sa fortune au commencement de la Revolution avec Fetat de sa fortune au moment de sa mort.

 

< Au moment oh la Revolution edata, notre pere ^tait avocat

 

conseils du Roi. C; est un fait dont il n'est pas necessaire de fournir la preuve: ses ennemia eux-m&nes ne le contestent pas. Nous ne pouvons pas etablir d'un maniere precise et certaine ce qu'il possedail a cette epoque, cependant nous disons que, s'il ne possedait rien autre chose (ce qui n'est pas prouve*) il posstdait au mains sa charge, et voici sur ce point notre raisonnement:

 

" (i) Quelques notes qui sont en notre possession nous prouvent que Jacques Danton, notre grand-pere, decide* a Arcis, le 24 f vrier 1762, laissa des immeubles sur le finage de Plancy et sur celui *d* Arcis, il est done presumable que notre pere, n le 26 octobre *759 e * P ar consequent reste* mineur en tres bas &ge, a dA poss^der un patrimoine quelconque, si modique qu'on veuille le supposer."

 

 [Here follow guesses as to how he paid for his place in the Cons&ils. They are of no importance now, as we possess the documents which give us this.  The only point of interest in the passage omitted is the phrase, “probably our mother brought some dowry,” We know its amount, but the sentence is an interesting proof of the complete dislocation which Germinal produced in the family.]

 

"Nous aliens etablir que ce qu'il poss&lait au moment de sa mort n'&ait que l^quivalent . peu pres de sa charge d'avocat aux conseils, Nous n'avons jamais su s'il a e*te* fait des actes de partage de son patrimoine et de celui de ses f emmes, ni, si, au moment de la confiscation de ses biens, il en a e'te' dresse* inventaire, mais noua savons trfes-bien et trfes-exactement ce que nous avons recueilli de sa succession, et nous aliens le dire, sans rester dans le vague sur aucun point, car c'est ici que, comme nous Tavons annonce', noa arguments vont 6tre base’s sur des actes authentiques.

 

" Nous f erons observer que l^tat que nous allons donner com- prend sans elistinction ce qui vient de notre pere et de notre mere.

 

" Une loi de f^vrier 1791 ordonna que le prix des charges et offices supprime’s serait rembourse par T^ltat aux titulaires. La charge que Danton poss&lait &ait de ce nombre. Nous n'avons jamais su, pas mme approximativement, combien elle lui avait coute\ II en re$ut le remboursement sans doute, car precis^ment vers cette ^poque, il commenja a acheter des immeubles dont voici le detail:

 

" Le 24 mars 1791, il achete aux ench&res, moyennant quarante- huit mille deux cents livres, un bien national provenant du clerge^ consistent en une ferine appeWe Nuisement, situe*e sur le finage de Chassericourt, canton de Chavanges, arrondissement d'Arcis, de*- partement de 1'Aube, & sept lieues d'Arcis. . . . Danton avait achetS cette fenne la somme de quarante-huit mille deux cents, ei .......... 48,200 liv.

 

A reporter . . . 48,200 liv " 12 avril 91. n achfete aux ench&res dn district d'Arcis, par I'entiemise de maitre Jacques Jeannet- Boursier ..... ...

 

[Then follows a list of purchases made in the month of April 1791, of which the most important is an extension to the house at Aicis the total of these is 33,600 livres j and in October 1791 a few acres of land in the town and a patch of wood for 3160 livres. Then follows the sum total]

 

" Total du prix de toutes les acquisitions d'immeubleB f aites par Danton en mil sept cent quatre-vingt-onze: quatre-vingt-quatre mille neuf cent soixante livrea, ci , * 84,960 liv.

 

" On doit remarquer qu'il est presumable que la plus grande partie de ces acquisitions a dft Stre paye~e en assignats qui, a cette ipoque, perdaient dejk de leur valeur et dont, par consequent, la valeur nominate 6tait superieuie a leur valeur r^elle en argeat, d'oti il re’sulterait que le prix r^el en argent des immeubles ci-dessus indiques aurait 6t6 inf^rieur b 84,960 livres.

 

u Depuis cette derniere acquisition du 8 novembre 1791 jusqu'k ea mort, Danton ne fit plus aucune acquisition importante: .*

 

[Here then is what Danton left.]

 

"(i) La ferme de Nuisement (vendue par nous le 23 juillet

 

 

 

"(2^) Sa modeste et vieille maison d'Arcis, avec sa depend- ance, le tout contenant non plus 9 arpents, 3 denr^es, 14 carreaux (ou bien 4 hectares, 23 ares, 24 centiares) seulement, comme au 13 avril 1791, ^poque oil il en fit Tacquisition de Mademoiselle Piot, mais par suite des additions qu'il y avait f aites, 17 arpents, 3 denies, 52 carreaux (ou bien 786 ares, 23);

 

<( (3) X 9 upeats, i denr^es, 41 carreaux (898 ares, 06) de pre" et wussaie;

 

"(4) 8 arpents, i denr<e, 57 carreaux (369 ares, 96) de boia; "(5) 2 denre"es, 40 carreaux (14 ares, 07) de terre situe*e dans 1'enceinte d'Arcis.

 

"Nous dclarons . qui voudra 1'entendre et au besoin nous d&larons sous la foi du serment, que nous n'avons recueilli de la succession de Georges-Jacques Danton, notie pere, et d'Antoinette- Gabrielle Charpentier, notre mere, rien, absolument rien autre chose que less immeubles dont nous venons de donner l'4tat, que quelques portraits de famille et le buste en pl&tre de notre mere, lesquels, longtemps apres la mort de notre second tuteur, nous furent remis par son Spouse, et que quelques effets mobiliers qui ne m&itent pas qu'on en fasse I'&uimdratioii ni la description, mais que nous n'en avons recueilli aucune somme d'argent, aucune cr^ance, en un mot rien de ce qu'on appelle yaleurs mobili&res, a Pexception pourtant d'une rente de 100 fr. 5 p. 100 dont MM. Defrance et D^tape, receveurs de rentes b, Paris, rue Chabannais, n 6, ont ope"r6 la vente pour nous le 18 juin 1825, rente qui avait 6te* achet^e pour nous par 1'un de nos tuteurs. . . .

 

" On pourra nous faire une objection qui m4rite une r^ponse; on pourra nous dire: Yous n'avez recueilli de la succession de yotre pere et de votre mere que les immeubles et lea meubles dont vous venez de faire la declaration, mais cela ne prouve pas que la fortune de votre pere, au moment de sa mort, ne se composat que de ces seuls objets; car sa condamnation ayant entrain^ la confiscation de tons sea biens sans exception, la E^publique a pu en vendre et en a peut-etre yendu pour des sommes considerables. Yous n'avez peutr^tre recueilli que ce qu'elle n'a pas vendu.

 

M Yoici notre rdponse:

 

"Les meubles et les immeubles confisque’s k la mort de notre pere dans le d^partement de TAube et non vendus, furent remifl en notre possession par un arrSte' de 1'administration de ce de^parte- menti en date du 24 germinal an IY. (13 avril 1796), arr&e* dont nous avons une copie sous les yeux, arr&te' pris en consequence d'une petition pr&ente'e par notre tuteur, arr^t6 base* sur la loi du 14 normal an III. (3 mai 1795), qui consacre le principe de la restitution des biens des condamne’s par les tribunaux et lee commissions r^volutionnaires, base* sur la loi du 21 prairial an III (9 juin 1795), qui leve le s^questre sur ces biens et en rfcgle le mode de restitution; enfin, arrt base* sur la loi du 13 thermidor an EH. (31 juillet 1795), ^ ont H- ne rappelle pas les dispositions.

 

" L'administration du d^partement de 1'Aube, dans la mme deliberation, arrte que le produit des meubles et des immeubles qui ont 6t& vendus et des intents qui ont & per9us depuis le 14 floras! an III. (3 mai 1795), montant k la somme de douze mille quatre cent cinq livres quatre sous quatre deniers, sera restitue* ^ notre tuteur, en bons au porteur admissibles en payement de domaines nationaux provenant ^emigres seulement. Nous ne savons pas si notre tuteur re$ut ces bons au porteur s'il les regut, quel usage il en fit; nous savons seulement qu'il n'acheta pas de biens d'emigr^s. II r&ulte ^videmment de cet arrete* de Tadminis- tration du d^partement de I'Aube, que dans ce d^partement le produit des meubles et immeubles provenant de Danton et vendua au profit de la E^publique, ne s'est pas ^leve* au-dessus de 12,405 livres 4 sous 4 deniers. C'&ait le total de l^tat de reclamation pr^sente par notre tuteur dans sa petition, et lout le monde- pensera, comme nous, qu'il n'aura pas manqu^ de faire valoir tous nos droits. On peut remarquer que dans cet arrSte' il est dit que ces 12,405 livres sont le montant du produit des meubles et dea immeubles vendus, et des inter ets qui ont &t& pergus depuis le 14 flor&lan IIL (3 mai 1795), . . . Mais si d'un c6t^ on doit ajouter 12,405 livres, d'un autre c6t^ on doit retrancher 16,065 li y rea qui restaient dues am personnes qui ont vendu k notre pere les immeubles dont nous avons h^nte*. . . .

 

" II est done ^tabli d'abord que dans le dpartement de l; Aube, le prix des meubles et des immeubles qui ont 6t6 vendus n'a pas pu s'&ever au-dessus de 12,405 livres; ensuite que notre pere, au moment de sa mort, devait encore 16,065 livres sur le prix d'acqui- sition des immeubles qu'il y poss^dait. . . .

 

c * Main tenant nous allons citer quelques faits authentiques qui pourront faire appr^cier la bonte* de son CCBUT. Nous avons vu pr^c^demment que ce fut en mars et en avril 1791 qu'il acbeta la majeure partie, on pourrait m^me dire la presque totalit^ dea immeubles qu'il poss^dait quand il mourut.

 

<( Yoici un des sentiments qui agitaient son coeur en mars et en avril 1791. II d&irait augmenter la modeste aisance de sa mere, de sa bonne mire qu'il adorait. Veut-on savoir ce qu'il s'empressa de faiie a son entree en jouissance de ces immeubles qu'il venait d'acheter? Jetons un regard sur 1'acte que nous tenons dans les mains, n a t pass4 le 15 avril 1791 (deux jours apres la vente faite a Danton par Mademoiselle Plot) par-devant M e Odin que en a gard la minute, et M e Etienne son collogue, notaires a Troyes. Danton y fait donation entre-vifs, pure, simple et irrevocable, sa mere de six cents livres de rentes annuelles et viag&res, payables de six mois en six mois, dont les premiers six mois payables au 15 octobre 1791. Sur cette rente de 600 livres, Danton veut qu'en cas de d^ces de sa mere, 400 livres soient reversibles sur M. Jean Kecordain, son mari (M. Eecordain tait un homme fort ais^ lorsqu'il 6pousa la mere de Danton; il etait extremement bon; sa bonte allait mme jusqu'a la faiblesse, puisque, par sa complaisance pour de pr^tendus amis dont il avait endoss^ des billets, il perdit une grande partie de ce qu'il avait apporte en mariage, n^annioins c'&ait un si excellent homme, il avait toujours &i& si bon pour les enfants de Jacques Danton, qu'ils le regardaient comme leur veritable pere; aussi Danton, son beau-fils, avait-il pour lui beau- coup d'affection). Le vif de"sir que ressent Danton de donner aux donataires des marques certain.es de son amiti^ pour eux, est la eeule cause de cette donation. Cette rente viagere est a prendre sur la maison et sur ses d^pendances, situdes a Arcis, que Danton vient d'acqu^rir le 13 avril 1791. Tel fat son premier acte de prise de possession.

 

"On remarquera que cette proprie'te', au moment oil Made- moiselle Piot la vendit, &ait lou^e par elle k plusieurs locataires qui lui payaient ensemble la somme de 600 livres annuellement. Si Danton eut 6t6 riche et surtout aussi riche que ses ennemis ont voulu le f aire croire, son grande cceur ne se fut pas content^ de faire a sa mire une pension si modique. Pour f aire cette donation Danton aurait pu attendre qu'il vint a Arcis; mais il 6tait si press^ d'ob^ir au sentiment d'amour filial qu'il iprouvait que, des le 1 7 mars 1791, il avait donne' a cet effet une procuration sp^ciale a M. Jeannet-Bourcier, qui ex^cuta son mandat deux jours apres avoir achete* pour Danton la proprie'te de Mademoiselle Piot. Aussitdt que la maison &tait devenue vacante et disponible, Danton, qui aimait tant etre entour^ de sa famille, avait voulu que sa mere et son beau-pere vinssent Thabiter, ainsi que M. Menuel, sa f emmo et leurs enfants (M. Menuel avait e'pouse' la soeur atne*e do Danton).

 

" Au 6 aout 1792 Danton e*tait k Arcis; on e*tait k la veille d'un grand eV^nement qu'il preVoyait sans doute. Au milieu des mille pense*es qui doivent alors 1'agiter, au milieu de Tinqutetude que doivent lui causer lea perils auxquels il va s'exposer, quelle idte pre*domine, quelle cramte vient 1'atteindre? II pense a sa mere, il craint de n'avoir pas suffisamment assur son mort et sa tranqmllit \ en voici la preuve dans cet acte pass6 le 6 aout 1792 par-devant M e Finot, notaire k Arcis. Qu'y lit-on? 'Danton voulant donner a sa mere des preuves des sentiments de respect et de tendresse qu'il a toujours eus pour elle, il lui assure, sa vie durant, une habitation convenable et commode, lui fait donation entre-vifs, pure, simple et irrevocable, de Tusufruit de telles parts et portions qu'elle voudra choisir dans la maison et de*pendances situe'es k Arcis, rue des Fonts, qu'il a aquise de Mademoiselle Piot de Courcelles, et dans laquelle maison sa mere fait alors sa demeure, et de Tusufruit de trois denre'es de terrain k prendre dans tel endroit du terrain qu'elle voudra choisir, pour jouir desdits objets k compter du jour de la donation. Si M. Jean Eecordain survit a ea femme, donation lui est faite par le meme acte de 1'usufruit de la moiti^ des objets qu'aura choisis et dont aura joui sa femme. . . .

 

"Yoici encore une piece, pen importante en elle-m^me a la v^rit^, mais qui honore Danton et qui prouve sa bont^: c'est un- p^tition en date du 30 thermidor an IL (17 aout 1794), adresse'e aux citoyens administrateurs du d^partement de Paris, par Mar- guerite Hariot (veuve de Jacques Geoffrey, charpentier a Arcis), qui expose que par acte pass devant M e Finot, notaire a Arcis, le ii dcembre 1791, Danton, dont elle e*tait la nourrice, lui avait assur3 et constitu^ une rente viagfere de cent livres dont elle de- vait commencer k jouir a partir du jour du dices de Danton, ajoutant que, de son vivant, il ne bornerait pas sa ge'n&osite' k cette somme. Elle demande, en consequence, que les administrae tenrs du departement de Paris, ordonnent que cette rente viagere lui soit pay6e k compter du jour du de*ces et que le principal en soit prelev^ sur ses biens confisque’s au profit de la Ke*publique. K"ous ne savons pas ce qui fut ordonn^. Cette brave femme, que notre pere ne manquait jamais d'embrasser avec effusion et a plusieurs reprises chaque fois qu'il venait k Aicis, ne lui surv&ut que pendant peu d'ann^es.

 

" La recherche que nous avons faite dans les papiers qui nous sont resits de la succession de notre grand'm&re Recordain, papiers dont nous ne pouvons pas avoir la totality ne nous a f ourni que ces trois pieces aufhentiques qui t^moignent en faveur de la bont6 de Danton dans sa vie priv^e. Quant aux traditions orales que nous avons pu recueillir, elles sont en petit nombre et trop peu caract&istiques pour etre rapport^es. Nous dirons seulement que Danton aimait beaucoup la vie champtre et les plaisirs qu'elle peut procurer. II ne venait k Arcis que pour y jouir, au "milieu de sa famille et de ses amis, du repos, du calme et des amusements de la campagne. II disait dans son langage sans recherche, k Madame Eecordain, en Pembrassant: * Ma bonne m&re, quand aurai-je le bonheur de venir demeurer aupr&s de vous pour ne plus vous quitter, et n'ayant plus a penser qu'k planter mes choux? '

 

11 Nous ne savons pas s'il avait des ennemis ici, nous ne lui en avons jamais connu aucun. On nous a tres-souvent parl de lui avec &oge; mais nous n'avons jamais entendu prononcer un mot qui lui fut injurieux, ni mme defavorable, pas m6me quand nous 4tions au college; Ik pourtant les enfants, incapables de juger la portte de ce qu'ils disent, n'hdsitent pas, dans une querelle occasionn^e par le motif le plus frivole, a s'adresser les reproches les plus durs et les plus outrageants. Nos condisciples n'avaient done jamais entendu attaquer la la m^moire de notre p&re, II n'avait done pas d'ennemis dans son pays.

 

11 Nous croyons ne pas devoir ornettre une anecdote qui se rap- porte k sa vie politique. Nous la tenons d'un de nos amis qui Pa souvent entendu raconter par son p&re, M. Doulet, homme tr&s re- commandable et tr^s digne de foi, qui, sous 1'Empire, fut long- temps maire de la ville d' Arcis. Danton &ait k Arcis dans le mois de novembre 1793. Un jour, tandis qu'il se promenait dans son jardin avec M. Doulet, arrive vers eux une troisi&me personne marchant k grands pas, tenant un papier k la main (c'tait un journal) et qui, aussit6t qu'elle fut k portfo de se faire entendre, s'&rie: Bonne nouvelle ! bonne nouvelle 1 et elle s'approche. Quelle nouvelle 1 dit Danton, Tiens, lis ! les Girondins sont condamnSs et ex^cut^s, r^pond la personne qui venait d'arriver, Et tu appelles cela une bonne nouvelle, malheureux 1 s'^crie Danton a son tour, Danton, dont les yeux s'emplissent aussit6t de larmes. La mort des Girondins une bonne nouvelle? Miserable ! Sans doute, rpond son interlocuteur; n'^tait-ee pas des fac- tieux? Des factieux, dit Danton. Est-ce que nous ne sommes pas des factieux? Nous m^ritons tous la mort autant que les Girondms; nous subirons tous, les uns apres les autres, le meme sort qu'eux. Ce fut ainsi que Danton, le Montagnard, accueillit la personne qui vint annoncer la mort des Girondins, auxquels tant d'autres, en sa place, n'eussent pas manqu^ de garder rancune. . . .

 

" La France aujourd'hui si belle, si florissante, te placera alors au rang qui t'appartient parmi ses enfants g^n^reux, magnanimes, dont les efforts intr^pides, inouis, sont parvenus L lui ouvrir, au milieu de difficult^ et de dangers innombrables, un chemin a la libert^, k la gloire, au bonheur. Un jour enfin, Danton, justice complete sera rendue a ta m^moire ! Puissent tes fils avant de descendre dans la tombe, voir ce beau jour, ce jour tant d&ireV'

 

DANTON.